8,6 %. Cette proportion de transactions immobilières réalisées avec un prêt relais en 2023, contre plus de 15 % il y a cinq ans à peine, dit tout d’une réalité qui change vite : le prêt relais, jadis passage obligé, ne fait plus la loi sur le marché immobilier.
Il reste bien là, pourtant. Les grands noms comme le Crédit Mutuel ou le Crédit Agricole le proposent toujours : une avance de trésorerie pour acheter avant de vendre, afin d’agir sans attendre. C’est la promesse sur le papier. Dans les faits, cette avance devient de moins en moins confortable, surtout quand la vente prend du retard.
Les conditions, elles, se sont corsées. Face à un marché moins animé et des taux d’intérêt qui s’envolent, la pression temporelle pèse sur l’emprunteur. À présent, les banques couvrent entre 50 % et 80 % de la valeur du bien à céder, en soustrayant toujours ce qu’il reste à rembourser sur le crédit initial. Et, changement notable : deux estimations professionnelles sont désormais exigées, histoire de ne plus jouer sur les disparités entre agences.
Le prêt relais ne s’adresse donc plus à tout le monde. Il cible les acquéreurs solides, disposant d’une situation financière saine et d’une réserve d’épargne. Les banques passent chaque dossier à la loupe : niveau d’endettement, apport personnel, régularité des revenus… L’accompagnement sur-mesure, prôné par les réseaux de courtiers, devient presque la règle pour ne pas se retrouver bloqué des mois durant. Dans les quartiers où la revente s’annonce difficile ou quand le logement sort des standards, l’établissement prêteur est même susceptible de refuser l’opération ou d’en limiter le montant.
Pour avoir une vision claire, mettons en avant les points à retenir :
- Avantages : anticiper l’achat du futur bien, pouvoir se positionner vite, gagner en souplesse lors des négociations.
- Inconvénients : taux souvent supérieurs à ceux des prêts immobiliers ordinaires, obligation de revendre rapidement, conditions d’accès plus strictes.
Oui, le prêt relais demeure, mais il se destine à des acquéreurs chevronnés, capables de faire face à l’imprévu dans un marché qui se montre aujourd’hui moins docile qu’hier.
Fonctionnement, conditions et particularités de ce financement immobilier
C’est une solution à durée limitée : le prêt relais ne dépasse généralement pas deux ans, douze à vingt-quatre mois en moyenne. La logique est limpide. La banque avance une fraction de la valeur estimée du bien ancien (entre 50 % et 80 %, moins le capital restant dû), pour permettre l’achat immédiat du nouveau logement. Les établissements réclament quasiment toujours deux estimations professionnelles afin de réduire leur exposition au risque.
Ce crédit temporaire existe sous diverses formules. Si la cession du logement suffit à couvrir la nouvelle acquisition, on parle de prêt relais sec. Plus fréquemment, il se combine avec un prêt immobilier classique : le prêt relais adossé. Dans certains cas, il est possible de reporter le paiement des intérêts jusqu’à la vente, grâce à la franchise totale. Cela soulage la trésorerie au début, mais augmente le coût total du crédit.
Impossible de négliger le contrôle exercé par la banque. Elle analyse la capacité d’emprunt, veille à ce que le taux d’endettement reste sous les 35 % des revenus, et réclame fréquemment un apport significatif. Les taux octroyés pour les prêts relais dépassent régulièrement ceux des crédits immobiliers traditionnels. À ce surcoût s’ajoutent des frais divers : dossier, garantie, hypothèque le cas échéant.
L’assurance emprunteur reste incontournable : décès, invalidité, perte d’emploi sont systématiquement évalués. Pour ceux qui achètent un bien en VEFA (vente en état futur d’achèvement), le prêt relais reste envisageable, mais les exigences montent d’un cran. La bonne nouvelle, c’est que si la vente aboutit plus rapidement que prévu, il est possible de rembourser le prêt relais sans pénalité, offrant ainsi une marge de manœuvre.
Quels points de vigilance avant de signer un prêt relais ?
Le prêt relais donne accès à des opportunités, mais il n’est jamais exempt de risques. Premier signal à prendre au sérieux : l’issue de la vente de votre logement actuel. Si le marché se grippe, impossible d’écarter le risque de devoir baisser son prix ou d’assumer pendant des mois deux charges importantes. C’est bien ce risque de non-vente dans le temps imparti qui reste le talon d’Achille du mécanisme.
Autre élément à surveiller de près : le taux d’intérêt, qui reste supérieur à celui d’un prêt immobilier classique. Mieux vaut scruter le TAEG proposé, et vérifier qu’il ne franchit pas le taux d’usure de la Banque de France. D’ailleurs, chaque banque ajuste ses offres selon les garanties apportées par l’emprunteur, les profils très sécurisés ont parfois plus de marge de négociation auprès de l’établissement ou via un courtier.
Impossible, aussi, de faire l’impasse sur les frais complémentaires : dossier, garantie, hypothèque, voire mainlevée en cas de remboursement avant terme. L’assurance emprunteur couvre l’ensemble des aléas qui peuvent bouleverser le projet.
Pour aborder ce prêt avec prudence, quelques réflexes s’imposent :
- Mesurez précisément votre capacité d’emprunt pour que le taux d’endettement reste sous le seuil de 35 %.
- Évaluez le potentiel de revente de votre bien : atypisme ou surcote risquent de prolonger la transaction.
- Pensez à signer un mandat de vente exclusif pour accélérer les chances de concrétiser la vente.
Gardez à l’esprit : si le TAEG dépasse le maximum légal, ou si votre profil n’offre pas assez de garanties, l’accès au prêt relais pourra vous être refusé. Chaque élément pèse dans la décision finale, et le recours à un spécialiste pour étudier toutes les contraintes s’avère bienvenu pour sécuriser son projet.
Alternatives et démarches à envisager si la vente tarde
Quand la revente s’éternise, il existe divers moyens d’éviter l’emballement du prêt relais. Premier axe : demander à transformer le prêt relais en crédit immobilier classique. Certaines banques l’acceptent, permettant d’étaler la dette sur une durée classique. Cela suppose toutefois de revoir tout le financement et d’absorber de nouveaux frais.
Autre voie : le prêt achat-revente. Ce produit proposé par des établissements spécialisés fusionne les deux prêts (ancien et nouveau) pour ne laisser qu’une mensualité à l’emprunteur. Ce dispositif lisse le remboursement sur plusieurs années, dès lors que la banque valide la solidité du dossier.
Pour ceux dont la situation urge, la vente à réméré permet de vendre à un investisseur tout en se laissant la faculté de racheter le bien à terme. Souvent choisie en dernier recours, cette solution s’accompagne d’une décote sur le prix et de frais élevés.
Certains propriétaires optent pour les services d’iBuyers, ces sociétés qui rachètent votre logement en quelques semaines, bien en deçà du prix du marché. L’avantage : obtenir des liquidités rapidement, solder le prêt relais et avancer, même au prix d’une perte financière.
Pour ne pas se retrouver acculé, voici quelques pistes à explorer :
- Songez à négocier un allongement du délai de remboursement avec votre banque.
- Étudiez la possibilité de louer votre logement invendu temporairement pour alléger le double poids financier.
- Faites appel à un courtier ou à un conseiller indépendant afin de simuler les différents scénarios de sortie.
À présent, le prêt relais ne se présente plus comme l’évidence qu’il fut. S’en saisir exige la clairvoyance des temps incertains : préparer son plan B, évaluer chaque détail, et ne jamais perdre de vue que la rapidité ne se décrète plus sur un marché où les repères ont bougé. Anticiper les méandres de la revente, c’est la clé pour éviter que ce dispositif ne se transforme en tremplin… vers plus de complications.